mardi 3 mars 2015

Pourquoi la démographie allemande est aujourd'hui un problème pour la France



Pourquoi la démographie allemande est aujourd'hui un problème pour la France


Par Cochin




   De manière régulière, l'on peut entendre les hommes politiques ou les médias signaler parmi les principaux points forts de notre pays sa démographie. De fait, l'indice de fécondité français (qui renvoie au nombre d'enfants par femme en âge de procréer) est dans notre pays de 2 quand il n'est que de 1,4 en Allemagne, où sa chute a suivi la mise en place des réformes Schröder (qui, pour cette raison et pour bien d'autres, loin d'avoir été un atout pour ce pays, semblent au contraire en avoir sacrifié l'avenir). 
   Bien souvent, une telle statistique, qui fait de la France un cas assez singulier en Europe, où seule l'Irlande conserve une natalité semblable, est considérée comme un atout pour l'économie française. Celle-ci devrait devrait en effet à moyen terme ne pas avoir les mêmes problèmes que ses voisins au sujet du financement des pensions de retraités de plus en plus nombreux alors même que le nombre des travailleurs baisse.
   Cependant, ce que l'on oublie généralement de signaler, c'est que cette situation est, aujourd'hui et dans l'Europe actuelle, davantage un problème qu'un atout pour notre pays.

Faiblesse démographique et préférence pour l'austérité

   La Tribune a récemment publié des extraits d'une note d'Olivier Passet (Xerfi) à propos de l'influence de la démographie sur les comportements économiques en Allemagne et au Japon. L'étude est intéressante en cela qu'elle remet partiellement en cause l'idée selon laquelle la politique allemande serait avant tout liée à des facteurs culturels (un goût naturel pour l'austérité, « un sérieux et une rigueur toute germanique » diraient même nos élites germanobéates) : pour O. Passet, c'est bien davantage la faiblesse démographique du pays qui explique ses choix en matière économique. 
   Comme le signale l'économiste, les deux régions qui sont aujourd'hui touchées (ou menacées de l'être) par la déflation sont aujourd'hui le Japon et l'Allemagne et la zone euro prise dans son ensemble, c'est-à-dire des régions dont la démographie est particulièrement faible. C'est donc une situation d'atonie démographique qui expliquerait d'abord la forte préférence de ces pays pour l'épargne, un déficit chronique de demande intérieure, un excédent courant massif et la recherche de rendements en dehors de leurs frontières pour asseoir la rente des retraités, avec pour corollaire une tendance déflationniste chronique. 
   Parce que leur population y croit peu voire décroit, ces pays n'ont nullement besoin d'une forte croissance et ont ainsi tendance à privilégier une très faible inflation, de manière à ne pas remettre en cause l'épargne de leurs citoyens. C'est cela qui pousse l'Allemagne a encourager la politique d'austérité que subit la zone euro.

Les conséquences pour la France

   C'est bien entendu d'une toute autre politique dont la France, du fait de sa propre démographie, aurait besoin. En raison de sa natalité combinée à une immigration importante, celle-ci a en effet besoin de favoriser la croissance, les investissements et donc in fine une certaine inflation. 
   Le problème, c'est que notre pays est bien seul en Europe à se trouver dans cette situation. Nos voisins italiens et espagnols sont du point de vue démographique bien plus proches de l'Allemagne que de nous. 
   Cet écart entre les démographies des différents pays européens (et donc entre les mesures économiques qui leur conviendraient) est un des arguments les plus importants contre la mise en place de politiques économiques communes à l'ensemble de la zone euro, qui ne peuvent se faire qu'au détriment de certains. C'est aussi une des raisons les plus fortes pour refuser le fameux « modèle allemand » qui fascine tant à l'UMP, à l'UDI et même au PS.

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